Une jolie petite histoire
Régine Pernoud était historienne. Davantage qu'historienne, elle était passionnée par l'histoire.
Son goût pour le passé de l'homme transparaît dans cet opuscule où elle condamne farouchement, mais avec beaucoup d'esprit, les lieux communs qui hantent les esprits sur le Moyen-Âge.
Elle n'épargne ni le découpage arbitraire d'une période traitée injustement ni les faits d'armes de journalistes, chercheurs ou romanciers dénués de sens critique ou de bonne foi.
Ainsi ce livret est-il chapitré en fonction des idées reçues et tel ou tel chapitre traite de la maladresse, de la barbarie, de l'inconsidération des femmes, de l'Inquisition.
A chaque fois, elle démonte avec minutie et conviction les erreurs qui conduisent à voir ces siècles de pensées humaines en une saison d'obscurantisme et d'ignorance sans précédent.
Il ne fait aucun doute à la lire que la Renaissance n'apporte rien de neuf par rapport aux périodes précédentes. Bien plus encore, elle constituerait un recul dans un certain nombre de domaines : la littérature se contente de copier les classiques alors que les copistes antérieurs ne présentaient guère de limite, le retour au droit romain retire certaines prérogatives aux femmes et aux enfants face aux coutumes et d'autres arts comme la peinture souffrent des mêmes travers que la littérature.
L'essai relativement bref de Régine Pernoud est passionnant. Il est très abordable par tous car il ne nécessite aucune formation spécifique, n'use pas de formulations hermétiques et reprend les exemples du quotidien.
Régine Pernoud aborde le problème avec une énorme passion et dispose d'un talent inouï pour la partager. Sa générosité intellectuelle et la foi qu'elle place dans ses propos amènent le lecteur à la suivre sans aucune difficulté.
Et comme il ne s'agit pas d'une de ces briques encyclopédiques et indigestes dont le seul objectif est de glorifier tel ou tel universitaire, il est enrichissant de découvrir qu'il m'a été simple de comprendre ces propos mais aussi rassurant d'avoir fermé le livre en ayant la sensation d'avoir appris un certain nombre de choses.
Un autre point important à souligner : le livre ne s'adresse absolument pas aux historiens en herbe mais est parfaitement tout public. L'auteur parle d'un sujet universel qui éclaire magistralement sur la perception que nous avons de notre passé. Il est stupéfiant de voir à quel point médias, écrivains, chercheurs même exercent parfois une influence sournoise sur notre jugement. Il semble pourtant capital de comprendre le martyr subi par une vérité bien souvent évidente : les temps actuels suivent une courbe descendante amorcée depuis le siècle abusivement dit des Lumières.
Régine PERNOUD, Pour en finir avec le Moyen-Âge, 1979.