The Rotters' Club
Dans Bienvenue au club, Jonathan Coe nous plonge avec un talent incomparable dans l'Angleterre des années 1970, celle de Birmingham en particulier : ses luttes sociales, son oscillation entre conservateurs et travaillistes, l'insidieuse et implacable montée en puissance du racisme, les attentats de l'IRA, mais aussi son incroyable renouveau musical, l'avènement du mouvement punk,... Il serait bon d'apprécier ce livre avec des écouteurs vissés sur les oreilles, une tasse de thé fumant à portée de la main. Les références littéraires ne manquent pas non plus (Joyce, Jane Austen, Fielding...). Bref : le décor est magistralement planté.
Mais là où Jonathan Coe excelle, c'est dans la manipulation habile et millimétrée des destins croisés de ses nombreux personnages : rien n'est laissé au hasard. L'auteur de Testament à l'anglaise crée une large gamme de personnages avec qui nous faisons intimement connaissance tout au long du roman. Sa force réside en ce que chacun est doté d'une personnalité vraiment particulière, d'un passé, d'une histoire, d'une façon de penser, même d'un langage propre. Ces nuances les rendent éminemment humains, et on se laisse aller à les aimer ou à les détester, et à les comprendre au fil des pages.
Jonathan Coe devient schizophrène lorsqu'il fait varier ses narrateurs au fil des chapitres, adoptant un style qui devrait être celui du personnage qui a la parole. Il pousse le jeu jusqu'à nous proposer des extraits de la gazette du lycée (certains hilarants) ou de journaux intimes. On ne peut s'empêcher de soupçonner Coe d'être un prodigieux observateur pour arriver à une telle virtuosité dans la création de caractères, et à une telle maîtrise dans l'esquisse de la vie quotidienne, dans laquelle il capte invariablement le tragique, le comique, le grave, le vrai.
Les nombreux récits enchevêtrés, dont l'auteur finit toujours par nous livrer les implications mutuelles, nous tiennent remarquablement en haleine, si l'on considère qu'ils ne concernent le plus souvent que des faits d'une banalité relative : la vie au lycée et les préoccupations classiques des adolescents, les amours interdites, les grèves, l'amitié,... Mais aussi des sujets plus graves, comme le bonheur et sa fin brutale, les violences policières, le racisme,...
C'est dès les premières pages que l'auteur nous donne envie de connaître l'histoire de Benjamin ; et dans les dernières pages, comme si nous venions de n'en tourner que quelques-unes, il suggère de lire Le Cercle fermé pour en connaître la suite...
Il vous faudra peut-être faire un petit effort de concentration pour situer les nombreux protagonistes les uns par rapport aux autres, sur au moins deux générations : Benjamin est le frère de Lois, Philip est son ami, Doug est le fils du syndicaliste Bill Anderton, est-ce Doug ou Philip qui est amoureux de Claire, la soeur de Miriam ? Ce qui est sûr, c'est que Benjamin ne vit que pour Cicely, que tous les mauvais coups commis au lycée sont le fait de Harding, et que Lois et Malcolm forment le couple idéal... Pour le reste, dépêchez-vous d'engloutir ces 530 pages, ou prenez des notes.
Jonathan COE, Bienvenue au club, 2003.
Mais là où Jonathan Coe excelle, c'est dans la manipulation habile et millimétrée des destins croisés de ses nombreux personnages : rien n'est laissé au hasard. L'auteur de Testament à l'anglaise crée une large gamme de personnages avec qui nous faisons intimement connaissance tout au long du roman. Sa force réside en ce que chacun est doté d'une personnalité vraiment particulière, d'un passé, d'une histoire, d'une façon de penser, même d'un langage propre. Ces nuances les rendent éminemment humains, et on se laisse aller à les aimer ou à les détester, et à les comprendre au fil des pages.
Jonathan Coe devient schizophrène lorsqu'il fait varier ses narrateurs au fil des chapitres, adoptant un style qui devrait être celui du personnage qui a la parole. Il pousse le jeu jusqu'à nous proposer des extraits de la gazette du lycée (certains hilarants) ou de journaux intimes. On ne peut s'empêcher de soupçonner Coe d'être un prodigieux observateur pour arriver à une telle virtuosité dans la création de caractères, et à une telle maîtrise dans l'esquisse de la vie quotidienne, dans laquelle il capte invariablement le tragique, le comique, le grave, le vrai.
Les nombreux récits enchevêtrés, dont l'auteur finit toujours par nous livrer les implications mutuelles, nous tiennent remarquablement en haleine, si l'on considère qu'ils ne concernent le plus souvent que des faits d'une banalité relative : la vie au lycée et les préoccupations classiques des adolescents, les amours interdites, les grèves, l'amitié,... Mais aussi des sujets plus graves, comme le bonheur et sa fin brutale, les violences policières, le racisme,...
C'est dès les premières pages que l'auteur nous donne envie de connaître l'histoire de Benjamin ; et dans les dernières pages, comme si nous venions de n'en tourner que quelques-unes, il suggère de lire Le Cercle fermé pour en connaître la suite...
Il vous faudra peut-être faire un petit effort de concentration pour situer les nombreux protagonistes les uns par rapport aux autres, sur au moins deux générations : Benjamin est le frère de Lois, Philip est son ami, Doug est le fils du syndicaliste Bill Anderton, est-ce Doug ou Philip qui est amoureux de Claire, la soeur de Miriam ? Ce qui est sûr, c'est que Benjamin ne vit que pour Cicely, que tous les mauvais coups commis au lycée sont le fait de Harding, et que Lois et Malcolm forment le couple idéal... Pour le reste, dépêchez-vous d'engloutir ces 530 pages, ou prenez des notes.
Jonathan COE, Bienvenue au club, 2003.